L'administration pénitentiaire à l'époque moderne
Avant la période révolutionnaire, le principe de la détention pénale est utilisé de manière très épisodique par les autorités. Il faut attendre 1791, quand le premier Code pénal fait de la peine privative de liberté la clé de voûte du système répressif, pour assister à la définition et à l'application des différents modes de renfermement. Pour la période moderne, l'entrée en application du Code d'instruction criminelle de 1808 provoque la refonte de la carte pénitentiaire du département de l'Ain et une profonde modification du principe de l'internement.
Trois types de prisons sont prévus :
1/ les prisons pour peines, appelées maisons de correction. Il y en a une par arrondissement, située auprès de chaque tribunal de première instance. On y détient les condamnés dont la peine n'excède pas un an. Pour des peines plus importantes, les condamnés sont transférés dans les maisons centrales (Embrun, Clairvaux, etc.)
Les dépôts de sûreté sont également classés dans la catégorie des prisons pour peines. Ce sont des établissements cantonaux ou municipaux d'enfermement placés sous la surveillance du maire. On place là les individus arrêtés en flagrant délit par la gendarmerie, en attendant leur transfert en maison d'arrêt. Ce lieu d'incarcération sert aussi pour les prisonniers de passage transférés sous escorte. Les dépôts de sûreté sont supprimés par la circulaire du 21 août 1872 et remplacés par les chambres de sûreté, placées sous le contrôle de la gendarmerie. On recense cette même année 44 maisons ou dépôts de sûreté dans l'Ain.
2/ les maisons de détention provisoire : appelées maisons d'arrêt, situées auprès de chaque tribunal de première instance, elles accueillent les prévenus en attente de jugement, mais aussi les prisonniers de passage, qu'il s'agisse de civils ou de militaires.
A Belley, Bourg, Gex, Nantua et Trévoux, les maisons d'arrêt et les maisons de correction sont confondues dans un même bâtiment. Dans la première moitié du XIXe siècle, prévenus et détenus cohabitent dans les même cellules, en dépit des instructions qui interdisent que les accusés qui ont en leur faveur la présomption de l'innocence soient mêlés aux condamnés. Les conditions de détention, souvent exécrables à cette période, seront en net progrès avec la construction d'une nouvelle génération de prisons dites " cellulaires ".
3/ les maisons de justice. Placée auprès de la cour d'assises, la maison de justice retient ceux contre qui a été rendue une ordonnance de prise de corps pour crime. Ils séjournent là jusqu'à leur jugement, voire, le cas échéant, jusqu'à la date de leur transfert vers une prison pour peine.
On mentionnera ici également les établissements spécifiques comme le dépôt de mendicité de Brou ou la colonie pénitentiaire de Villette (voir les articles qui leur sont consacrés)
Organisation et rattachement de l'administration pénitentiaire (1795-1943)
Depuis la loi du 10 vendémiaire an IV, l'administration pénitentiaire dépend du ministère de l'Intérieur. Elle est placée, de 1831 à 1834 sous la responsabilité du ministère du Commerce et des Travaux publics avant de revenir à l'Intérieur. A l'échelon national, la direction centrale est accompagnée d'une inspection générale et d'un conseil général des prisons. Quant aux directions régionales, elles ont pris une forme très fluctuante. On en dénombre à l'origine une par département puis de moins en moins au fur et à mesure que ces circonscriptions s'agrandissent : quarante-cinq en 1871, trente-et-une en 1897, et seize après la réforme de 1926. Placés à la tête des maisons centrales, les directeurs régionaux doivent aussi inspecter les établissements de leur ressort et contrôler l'action des gardiens-chefs placés à la tête des prisons départementales.
Le décret du 13 mars 1911 rattache l'administration des Prisons au ministère de la Justice. D'abord autonome, elle est ensuite incorporée, le 20 août 1926, à la direction des Affaires criminelles et des Grâces, avant de retrouver son autonomie en 1930. Les décrets d'octobre et décembre 1935 assimilent le personnel pénitentiaire à celui du ministère de la Justice. Ils réorganisent également la direction de l'Administration pénitentiaire avant que celle-ci ne soit rattachée, par la loi du 13 septembre 1943, au secrétariat au Maintien de l'Ordre, au sein du ministère de l'Intérieur.