Le but recherché par le législateur, en créant les justices de paix, était d'aplanir les différends plutôt que de trancher. A-t-on repris cette idée aux Anglais, aux Hollandais ? Cette idée a-t-elle été rapportée par Voltaire ? En réalité une part de leur origine se situe dans une pratique ancienne française : les justices de paix succèdent aux justices seigneuriales, en continuant parfois les mêmes registres...
Une justice de paix fut créée par canton. Les juges de paix étaient élus par l'assemblée primaire des citoyens actifs du canton. Aucune formation ou exercice du métier n'était exigé. Il fallait seulement être âgé d'au moins 30 ans. Ces juges étaient élus pour deux ans et rééligibles indéfiniment. Il y avait une justice par canton, mais les villes trop importantes furent partagées. Ces justices de paix étaient des justices de proximité.
Selon l'article 9 de la loi du 16-24 août 1790, le juge de paix devait être assisté de deux assesseurs.
La justice civile
Le juge de paix jugeait toutes les causes mineures en dernier ressort jusqu'à la valeur de 50 livres et, à charge d'appel, jusqu'à la valeur de 100 livres. Son rôle était de concilier autant que possible les parties en litige avant d'engager une procédure.
En cas d'échec, les parties devaient aller devant le bureau de paix pour une autre conciliation. C'était le juge de paix et ses assesseurs (de 2 à 4) qui siégeaient en formation de " paix et conciliation ". Cette procédure était un préalable obligatoire à toute action principale au civil.
Si les deux parties étaient domiciliées dans les ressorts de différents juges de paix, elles devaient alors comparaître au bureau de paix installé au tribunal de district et devant six personnes choisies pour deux ans (parmi des personnes recommandables).
Le juge de paix était chargé de nombreux actes de juridiction gracieuse (appositions de scellés, délibérations de familles, tutelles, curatelles...)
La justice répressive et le tribunal de police correctionnelle
Le juge de paix pouvait juger aussi en matière de police correctionnelle. Pour cela il siégeait différemment, en constituant un tribunal spécifique.
Installé dans chaque chef-lieu de canton, le tribunal de police correctionnelle s'occupait des infractions d'une certaine gravité : homicides involontaires, vols simples, escroqueries, atteintes aux moeurs, insultes et violences légères, outrages aux agents de la force publique, mendicité et vagabondage, atteintes à l'exercice libre des cultes.
Il ne disposait, pour sanctionner, que d'amendes et de deux ans d'emprisonnement au maximum. Le juge de paix présidait ce tribunal dans les petites communes, assisté de deux assesseurs-citoyens (à voix uniquement consultative). Dans les plus grandes villes où il y avait plusieurs justices de paix, c'est l'un des juges qui présidait, assisté de deux assesseurs, parmi lesquels on pouvait trouver un ou deux autres juges de paix (c'était le cas à Bourg).
Dans les villes de plus de 60 000 habitants, le tribunal était composé uniquement de juges de paix, au nombre de six.
Le mode de déclenchement de cette procédure était surprenant. Elle commençait par une dénonciation de la part d'un simple citoyen ou de la victime. Les délateurs n'étaient pas considérés comme tels. La Constituante estimait que chacun devait être responsable de l'ordre public et du respect des lois : dénoncer était donc un devoir civique. Cette dénonciation était portée devant le procureur de la commune. Là encore c'est un officier municipal qui exerçait un rôle judiciaire. Il ne jugeait pas mais exerçait des poursuites. L'appel se faisait devant le tribunal de district.
Au cours de la procédure criminelle relevant du tribunal criminel, le juge de paix commençait l'instruction de l'affaire : il faisait les premières constatations, recevait les témoignages et dressait les procès-verbaux.